La lecture attentive de tout le matériau sélectionné m’a permis d’isoler un certain nombre de thèmes et de micros événements qui semblaient ressortir plus clairement.

- La ville comme personnage central du drame : Toutes les réactions à l’évacuation de Rhino ont été le plus souvent dictées par un regard porté sur la ville, sur ce qu’est le vivre ensemble dans une grande ville de plus de cent mille habitants, sur ce qui nous relie. Dans la bouche des différents protagonistes, Genève est devenue un être vivant. Certains étaient tristes pour elle. D’autres heureux. C’est comme si dans l’évacuation de Rhino se jouait le destin de Genève.

- La notion de privilège : C’est la ligne de force qui doit traverser tout le texte et tout le spectacle. De nombreuses personnes ont réagi en soulignant que les squatteurs étaient des privilégiés. Qu’est-ce qui se cache derrière cette notion de privilège ? Les squatteurs sont-ils réellement des privilégiés ? Et si oui, par rapport à qui ? Par rapport à quoi ?

- La notion de légalité : Entre les actions des autorités et celles des squatteurs s’est joué une sorte de duel sur le terrain du droit. Les uns ont agi en justice plus que de mesure. Les autres sont passés par des méthodes inusitées pour procéder à l’évacuation. C’est l’existence juridique des squats qui est mise en jeu. Les temps ont-il changé ? Faut-il inventer une nouvelle pratique? Trouver un nouveau consensus ?

- L’atteinte au droit de l’homme : C’est un slogan répété sans cesse par les squatteurs de Rhino. Ils ont été victimes d’une violation des droits de l’homme. Cet argument peut-il être martelé quand on connaît la situation des droits de l’homme dans d’autres pays ?

- Le statut du squatteur : Certains propos tenus ont rabaissé les squatteurs au rang de vermine, de parasite. D’une certaine manière, leur qualité d’humain leur était déniée. Des arguments avancés contre les squatteurs étaient de dire que leur évacuation allait permettre à des familles de trouver un logement comme si les squatteurs eux-mêmes ne fondaient pas de famille, n’avaient pas d’enfants.

- La violence : C’est le sempiternelle question en cas de manifestation qui déborde comme cela a été le cas avec la grande manifestation de fin juillet. D’où vient-elle ? Est-elle une fatalité ? En parler, n’est-ce pas l’entretenir ?

- La caricature du procureur général : Sur les murs de Rhino, une caricature a été af- fichée habillant le procureur général en nazi avec une petite moustache à la Hitler. Suite à une plainte, la caricature a été enlevée. Peut-on tout dire ? Tout faire pour faire entendre son propos? Toutes les comparaisons sont-elles possibles ? On pourrait encore citer pêle-mêle : l’épisode de la vente de la corne de Rhino sur Ebay, le débat sur la culture alternative, les interventions dans la presse d’un avocat célèbre…