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L'Obombrée

mise en scène Francine Wohnlich

: L'Obombrée ?

L'Obombrée signifie celle qui a reçu une ombre. Précisément, celle qui a été couverte d'ombre. Ce mot vient du latin ob-umbrare : recouvrir d'ombre, « engrotter » de nuit.


Dans Luc I – 35, dialogue entre Gabriel et Marie : "Le messager répond et lui dit : "Le souffle sacré viendra sur toi, la puissance du Suprême t'obombrera." (traduction André Chouraqui)


D'emblée, ce mot s'oppose à la tradition des révélations et autres illuminations, au miracle de la lumière de l'entendement et du mystère subitement dévoilé. L'obombrement indique au contraire que la vie se transmet dans la nuit, dans l'obscur et l'incompréhensible.


En réunissant trois héroïnes mythologiques, grecque (Antigone), juive (Marie) et contemporaine (Alexandrie), L’Obombrée nous parle d’un même mouvement : celui de la singularisation. Trois femmes au seuil de leur vie doivent prendre des risques mortels pour devenir elles-mêmes, tant leur désir porte à contre-sens du pouvoir établi. Elles posent la question de l’appartenance : est-il possible de vivre dans un « nous » qui ne soit pas fait que de « même » ? Faut-il renoncer à soi-même pour trouver place dans le bal ? L’une et l’autre sont confrontées à la loi et à l’inceste : Loi de Créon et Loi du Père. Elles cherchent à se situer face à la violence qui les entoure. Par un jeu de miroirs, Marie met en lumière les motifs personnels d’Antigone : son refus n’est pas que politique, il dit aussi son impossibilité à devenir mère, son angoisse à transmettre les souillures familiales dont elle est issue. Antigone révèle le courage de Marie qui se met au ban de la communauté en choisissant de vivre sa rencontre avec l’ange. Adultère, elle est bannie hors du peuple de la Loi et condamnée à la lapidation. Quels sont ces deux célèbres « oui » et « non », de quoi sont-ils faits ? Alexandrie dit l’espace intérieur commun aux trois femmes, là où affirmer son désir est de même souche que s’opposer à une démence politique. Où résistance civile et intimité creusent pareillement l’écart où apparaître dans sa singularité.


De chacune, nous avons déjà entendu parler. Si je me souviens bien, ça parle de… rébellion, de… miracle, d’anéantissement… ? C’est dans ces pointillés, dans ces suspensions de la mémoire collective, que L’Obombrée ouvre des pistes inédites. En confrontant ces personnages, imaginés dans toute leur singularité, avec les grands mythes auxquels ils appartiennent, le théâtre invente un espace d’expérimentation où interroger l’appartenance à un groupe et le fragile équilibre entre soi et les autres, entre le dedans et le dehors.


La subjectivité de l’auteur-comédienne redessine le monde : si quelque chose de ces personnages aujourd’hui encore "joue" en elle, c’est qu’il y a sens à ce que l’intime et le très vaste se rencontrent. Pouvoir dire l’intime étant peut-être la condition pour pouvoir dire ce qui nous rassemble.

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