theatre-contemporain.net artcena.fr

Accueil de « Grande Vacance »

Grande Vacance

+ d'infos sur le texte de Joël Dragutin
mise en scène Joël Dragutin

: Une mise en scène du désir

Porter sur la scène nos mythologies contemporaines, celles qui se manifestent aussi bien dans les publicités que dans les «langues de bois» politiques ou commerciales, celles qui confortent les illusions sur la «réussite» et surtout celles qui nous figent dans le confort biologique, a constitué le sens permanent de mon travail d’auteur de théâtre, depuis La Baie de Naples. Et si la scène est un révélateur, une loupe grossissante qui rend visible ce qui était vécu dans l’opacité de l’évidence, elle est aussi un accélérateur métaphorique libérant de formidables énergies transformatrices et émancipatrices : ce mouvement pendulaire incessant entre le dévoilement «hic et nunc» et l'invitation au voyage me passionne.


En éclairant ainsi les pouvoirs mystificateurs qui nous agitent et nous hantent, il m'a semblé, d’une pièce à l’autre, que l’obsession permanente de notre temps était le Bonheur, non pas recherché par les voies de la réflexion et de la sagesse, mais éperdument convoité par celles de la consommation. Mais parallèlement, je constatais bien, à travers ma vie, mes lectures et de nombreux témoignages, que ce modèle du Bonheur, continuellement ressassé, ne fonctionnait pas. Que ceux qui le recherchaient le plus étaient également les plus insatisfaits, malheureux, déprimés. Je constatais une baisse d’entrain, de désir même, dans les classes moyennes occidentales, comme si l’euphorie qui accompagnait les «Trente Glorieuses» était en panne désormais. Et l’idée d’une pièce qui interroge ce déclin du désir s’est peu à peu imposée à moi. J’ai confronté mes réflexions d’auteur à celles d'intellectuels que nous avons invités lors de conférences-débats au Théâtre 95 (Daniel Sibony, Bern a rd Stiegler, Edgar Morin, Pierre Dupuy, Pascal Bruckner…).


Il m’est apparu que, si le théâtre parle souvent, et à juste titre, des fractures et des détresses de l’existence, il peut toutefois trouver dans les mythes du bonheur, dont se pare une civilisation, un angle d'attaque stratégique pour comprendre les croyances, idéologies et symbolisations d’une époque. La mythologie d’un consumérisme radieux s’est largement imposée en Occident et, par la mondialisation des échanges, se diffuse à la planète entière : l’enjeu est d’importance ! Et si ce modèle de développement sans fin, sans limites, était une erreur, une option insoutenable, une course vers la catastrophe ?


Grande Vacance, parle de la vacuité au coeur de l’abondance, d’un «malaise dans la civilisation» qui se creuse. Un monde qui s’achève sans avoir trouvé encore de contre-modèle alternatif, avec le chaos qui s’en suit.
«L’ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour ; dans cet inter-règne surgit une grande diversité de symptômes morbides», écrivait Gramsci.



Joël Dragutin
auteur/metteur en scène

imprimer en PDF - Télécharger en PDF

Ces fonctionnalités sont réservées aux abonnés
Déjà abonné, Je me connecte Voir un exemple Je m'abonne

Ces documents sont à votre disposition pour un usage privé.
Si vous souhaitez utiliser des contenus, vous devez prendre contact avec la structure ou l'auteur qui a mis à disposition le document pour en vérifier les conditions d'utilisation.