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Hamlet

+ d'infos sur le texte de William Shakespeare traduit par Gérard Watkins
mise en scène Gérard Watkins

: Note d’intention

Par Gérard Watkins

C’est un rendez vous avec la plus mythique des écritures de Shakespeare. La traversée fulgurante d’un monde dont le pourrissement a commencé bien avant le meurtre du père d’Hamlet. Celle des guerres absurdes me - nées par des orgueils démesurés, celle des amours violents et possessifs, celle de la place assignée à la femme dans l’Histoire.
L’objectif est de jouir ensemble de cette magnifique leçon d’anti-héroïsme menée par la plus belle tribu de losers jamais inventée. Pour la traduction, je n’ai lu que les textes anglais, et j’ai eu la joie de plonger dans l’histoire des représentations d’ Hamlet. J’ai pu développer et inscrire mes propres interrogations : remplacer le pentamètre par une forme de musicalité et d’invitation à la scansion, par des coupes, concentrer le texte sur son aspect familial plutôt que militaire.


Il y a chaque année quelque part dans le monde une femme qui joue Hamlet. J’ai tenu à renouer avec cette tradition qu’ Hamlet soit jouée par une immense actrice. Ce sera ma cinquième collaboration avec Anne Alvaro, une sorte de célébration de notre amour du travail. Au-delà de l’empowerment nécessaire, je vois une volonté de déjouer la transmission de la vendetta, de la trop persistante violence masculine, pour faire machine avant vers l’empathie, le sensible, la pensée et le poétique. Pourtant, le fantôme du père est tenace.


Errant dans son purgatoire pour n’avoir pas eu la possibilité d’expier ses crimes atroces, il gâchera à jamais pour le prince toute possibilité d’un amour heureux. Aucun parcours ne raconte mieux l’iniquité et l’injustice faite aux femmes que celui d’Ophélie. À l’opposé de son frère Laertes à qui sont proposées la liberté et la jouissance, Ophélie n’a comme horizon que l’enfermement et le dogme de la peur d’être abusée sexuellement.


La magnifique invention de Shakespeare va au-delà d’un règlement de compte. Il dirige son ensemble scénique vers la plus parfaite symbiose des « amants, fous et poètes ». Mes récentes recherches sur l’hystérie pour Ysteria m’ont ouvert des portes empathiques et compréhensives sur le mystère humain et les degrés d’expressions artistiques véhiculées par la folie. Les essais de Freud, qui a toujours cherché dans les œuvres dramatiques, de Shakespeare à Ibsen, les traces de l’invention de la psychanalyse, sont évidemment une source d’inspiration . On peut y fouiller autant qu’on veut, on n’y trouvera aucune réponse. Car c’est précisément le théâtre, dans tout son art, dans toute sa mise en abîme, présent derrière chaque syllabe, qui nous embarquera, de signes en signes, vers le sommet d’un pur au-delà poétique. Et on se prendra de plein fouet la voracité de la représentation de la folie par Hamlet. On le sait amoureux de l’art dramatique comme on le sait enclin à la mélancolie.
L’extension de la folie vers la poésie est, chez Shakespeare, naturelle : de la poésie à l’art d’aimer pour mieux basculer dans l’art d’être fou. Troubles d’oppositions comportementales, hallucinations visuelles et auditives, mélancolies psychédéliques seront au rendez-vous. Ophélie nous enterrera tous avec une leçon d’art brut dont on ne se relèvera pas. Ce n’est pas juste Hamlet qui est subversif et insolent.
C’est Shakespeare tout entier se cachant comme d’habitude derrière un léger paravent, qu’il suffit de déplacer. Parce qu’au théâtre, on y déplace des paravents.


  • Gérard Watkins
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