Pierre Corneille, Jean Racine, Nada Strancar
Créé en 2018
Nicomède ou Suréna ? Face à ce choix cornélien, Brigitte Jaques-Wajeman n’hésite pas à créer en alternance ces deux pièces, respectivement pièce préférée et dernière œuvre du dramaturge rouennais. Nicomède comme Suréna racontent les désillusions qui attendent tout général victorieux, et même héritier légitime, auprès de monarques jaloux de pareils exploits et bientôt effrayés d’une rivalité possible. Si Nicomède parvient avec une étonnante et réjouissante outrecuidance à déjouer les pièges paternels et royaux, Suréna, lui, s’enfonce dans la plus grande noirceur et s’achève par la mort des amants, réunis dans l’éternité. Si Nicomède échappe à la mort, Suréna préfère l’amour (« Toujours aimer, toujours souffrir, toujours mourir ») aux turpitudes ambiantes. Ciselée, intelligente, précise, la mise en scène dit comme jamais les sentiments spoliés et les désirs bafoués et une troupe de huit comédiens, belle et vibrante, s’emparent de ce maelström d’alexandrins avec une exigence qui force le respect. Autour de la table où les convives se gavent de pouvoir, Brigitte Jaques-Wajeman sert un Corneille électrisé et invite le public à partager ce festin de rois… ou de dupes.