« Qui voudra jamais épouser une négresse ? »

Ces mots, qu’elle n’aurait pas dû entendre, foudroient Ourika, silencieuse derrière un paravent. Elle a quinze ans, c’est d’elle qu’on parle avec inquiétude. Jusque là rien ne l’avertissait que sa peau noire pourrait l’empêcher d’être aimée. Sauvée depuis l’enfance de l’esclavage par le chevalier De Boufflers, la petite Sénégalaise avait été offerte peu avant la Révolution à Madame De Beauveau, qui va l’élever dans son salon aristocratique, avec son propre petit-fils. Un frère plus qu’un frère pour Ourika, qui soudain se voit condamnée à « être seule, toujours seule. »

La narration de cette histoire réelle sous forme d’une longue confession, d’une facture très classique, confère à ce premier roman magistral de Madame DE DURAS une étonnante modernité quand il paraît en 1824. D’autant qu’écrit sur un mode mineur qui le rend d’autant plus percutant, il aborde de front la question, déjà vive, de l’exclusion raciale.

GOETHE, dit-on, a pleuré en le lisant, Christine ANGOT en a parlé tout récemment à la radio comme d’un chef d’œuvre absolu de la littérature française.