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Portrait Avedon-Baldwin. Entretiens imaginaires

mise en scène Élise Vigier

: Note d’intention

Par Elise Vigier et Kevin Keiss

Nothing Personal de James Baldwin et Richard Avedon est un ouvrage-dialogue entre deux amis qui ne parlent pas la même langue artistique : l’un est auteur et l’autre photographe. Si on les résume à leur fiche d’état civil : l’un est noir et homosexuel, l’autre blanc et juif. Tous deux sont américains, et portent sur les États-Unis un regard qui n’élude pas la douleur, un regard amoureux, d’une clairvoyante lucidité.


James Baldwin décrit infatigablement les maux d’un pays rendu fou par sa propre histoire : la coexistence de l’extermination des Indiens et de l’esclavage tout en s’auto-revendiquant pays de la liberté. Richard Avedon, après avoir été le photographe des stars et des tops modèles, décide de photographier les corps des Américains.


Leur nudité. Les corps ne mentent pas. Ils sont éloquents sans les mots. Leurs faiblesses et leurs secrets décrivent sensiblement les histoires minuscules de la Grande Histoire impérialiste américaine.


Baldwin et Avedon ont en commun une extrême délicatesse et une sensibilité rare mais surtout une grande tendresse, une sensualité électrique dans l’autopsie d’un pays en crise identitaire. Ils ont l’obsession d’une responsabilité envers les générations postérieures en étant des témoins, des passeurs.


Quel monde laisserons- nous aux enfants, à ceux qui viendront après nous ? Et quand ils chercheront des réponses dans les obscurités qui seront les leurs, vers quoi pourront-ils se retourner pour chercher des réponses ?


Durant les années de la création de Harlem Quartet , nous avons – la metteuse en scène Élise Vigier et l’auteur/traducteur Kevin Keiss – nous aussi entamé un dialogue, comme autant de routes de traverses pour parler de l’identité, de nos identités complexes, troubles, éclatées, fragiles. Une totale immersion dans l’œuvre et la réflexion politique humaniste de Baldwin. Des constellations de livres, de films : les images vibrantes de Jonas Mekas. La forêt d’Appelfeld et ses « tâches de mémoires ». La façon dont le rire est toujours présent dans la tragédie.


Comment, au travers des photographies, les événements politiques et l’intime se tissent-ils ? Quelles images s’effacent et quelles images restent ?


Faire dialoguer Baldwin et Avedon par ce qu’on sait d’eux – les multiples interviews qu’ils ont laissées – mais aussi troubler le réel en superposant à leurs voix, les nôtres, nos voix en même temps que celles des deux acteurs : Marcial Di Fonzo Bo et Jean-Christophe Folly. Se dessine dès lors une carte de l’intime et du politique : quelque part entre Harlem et Barbès, la Normandie, Buenos Aires et le Togo. Entre les États-Unis en 1964, et nos enfances des années 70 et 80 – et la France d’ici, celle dans laquelle nous vivons aujourd’hui.


Car à travers Baldwin et Avedon, c’est le rapport à nos origines sans origine qui s’impose et la façon dont nos obsessions artistiques sont les témoins du monde que nous aussi nous laisserons.

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