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Tempête sous un crâne

mise en scène Jean Bellorini

: Note d'intention

Par Jean Bellorini

  • « Partout où l’homme ignore ou désespère, partout où la femme se vend pour du pain, partout ou l’enfant souffre, faute d’un livre qui l’enseigne et d’un foyer qui le réchauffe, le livre « les Misérables » frappe à sa porte et dit : Ouvrez moi, je viens pour vous » Victor Hugo

Ce spectacle est une adaptation des Misérables, pour deux comédiens dans la première partie et cinq dans la seconde, qui prennent en charge toute la poésie de Victor Hugo. Tour à tour ils s’écoutent, se coupent la parole ou se mettent à scander ensemble l’histoire des Misérables comme on pourrait se mettre à chanter une chanson. Ils s’obsèdent autant par l’action du récit que par la poésie de la langue.
A la manière de En attendant Godot, ces bonshommes se retrouvent dans un espace qu’ils ne connaissent pas. Ils attendent on ne saura jamais quoi. Ils comblent le vide grâce à la parole, leur seule arme pour survivre. Parler pour ne rien dire peut-être mais parler pour exister. Et si la poésie était salvatrice...



Raconter tous les personnages de l’oeuvre, les faire vivre dans un même corps pour représenter la complexité de l’homme, tel est notre pari. La frontière entre la narration et l’incarnation sera invisible. Les personnages sont ancrés dans notre réalité (un arbre, un lit en fer, une gazinière, un frigo, autant d’éléments qui viendront s’accumuler au fur et à mesure du spectacle, tout comme les mots, et le nombre d’acteurs sur le plateau). On assiste à une tranche de vie de ces « petites gens » tout en glissant progressivement vers l’histoire.


La construction du spectacle a été faite par étapes successives de coupures du texte original de Victor Hugo. Ici pas de réécriture, mais une fidélité à l’auteur. Equilibre entre l’avancée active dans la progression du récit et le lyrisme de l’écriture. Il ne s’agit surtout pas que notre adaptation soit un « digest ». Il est fondamental pour nous tout autant de garder le fil narratif de l’histoire que de garder la profusion lyrique et pathologique de certains moments de descriptions, de logorrhées. C’est dans cet esprit que la musicalité du texte et sa rythmique ont jaillis. Certains passages sont mis en musique réellement à la manière de chansons, d’autres fleurtent avec le « slam » ou le « rap ».


Deux musiciens témoins de ces personnages venus d’ailleurs peuvent aussi devenir figure de ce qui est raconté. Ils jouent de plusieurs instruments (piano, accordéon, basse, percussions, guitarre éléctrique). Ils donneront compte d’un univers à la fois poétique, et populaire. La modernité des sons dans leur traitement apportera une note contemporaine et onirique à cette histoire intemporelle et toujours aussi d’actualité. Enfin plusieurs poèmes issus des Contemplations et des Châtiments de Victor Hugo ont été mis en musique.


PREMIERE EPOQUE


L’histoire : autour de Jean Valjean…
Le texte est extrait de la première partie du roman Les Misérables .
L’histoire de Jean Valjean depuis sa sortie du bagne, en 1815, jusqu’au procès du père Champmathieu.
L’histoire de Fantine depuis sa jeunesse jusqu’à sa mort dans les bras de monsieur Madeleine (Jean Valjean).
L’histoire de Cosette depuis sa naissance jusqu’au départ de chez les Thénardier quand Jean Valjean vient la chercher.
L’histoire des Thénardier à Montfermeil.


DEUXIEME EPOQUE


L’histoire de Javert qui poursuivra Jean Valjean toute sa vie, jusqu’à le chercher dans les étoiles, puis au fond de la seine.
L’histoire de Jean Valjean devenu monsieur Leblanc.
L’histoire d’amour de Marius et de Cosette.
Le drame d’Eponine qui donnera sa vie pour Marius.
L’histoire des Thénardiers devenus les Jondrettes.
L’histoire de Gavroche.
Et l’histoire de tous les amis de l’ABC jusqu’aux montées des barricades. L’abaissé c’est le peuple. (Enjoleras, Feuilly, Courfeyrac, Combeferre, Jean Prouvaire et beaucoup d’autres).



Le héros hugolien incarne le mythe de la renaissance de l’homme et de la rédemption du forçat. Illuminé par la rayonnante charité d’un évêque, il devient à son tour profondément altruiste. Traqué par Javert, il est confronté à un dilemme cornélien que la fameuse nuit intitulée « Tempête sous un crâne », retrace magnifiquement. Le procès à la Cour d’Assises d’Arras est à lui seul un morceau d’anthologie. Ce texte a aussi valeur de document historique sur un système répressif impitoyable avec l’évocation de la survie dans les bagnes français au XIXème siècle.
Son actualité est évidente, qu’il s’agisse de l’inadaptation des peines ou de la préparation à la réinsertion sociale d’un condamné ; il donne encore à réfléchir sur les faiblesses des systèmes judiciaires contemporains.


Mais surtout Hugo défend l’idée que seuls l’instruction, la justice sociale et l’humanisme empêcheront les « misérables » de devenir des « infâmes ». Il ne désespère pas de sauver les criminels, même les plus endurcis, à force de patience et d’amour. A travers ce personnage, l’écrivain a incarné tous les espoirs et les élans de son coeur généreux. C’est un véritable plaidoyer pour le progrès social et la fraternité humaine.
Même si il ne s’agit pas, à l’origine d’un spectacle jeune public, je sens qu’il est important de faire entendre ces valeurs au maximum d’individus qui sont entrain de se construire et d’évoluer dans notre monde.


  • « Ne nous lassons pas de le répéter, songer, avant tout, aux foules déshéritées et douloureuses, les soulager, les aérer, les éclairer, les aimer, leur élargir magnifiquement l’horizon, leur prodiguer sous toutes les formes l’éducation, leur offrir l’exemple du labeur, jamais l’exemple de l’oisiveté, amoindrir le poids du fardeau individuel en accroissant la notion du but universel, limiter la pauvreté sans limiter la richesse, créer de vastes champs d’activité publique et populaire, employer la puissance collective à ce grand devoir d’ouvrir les ateliers à tous les bras, des écoles à toutes les aptitudes et des laboratoires à toutes les intelligences, augmenter le salaire, diminuer la peine, balancer le doit et l’avoir, c’est à dire proportionner la jouissance à l’effort et l’assouvissement au besoin, en un mot, faire dégager à l’appareil social, au profit de ceux qui souffrent et de ceux qui ignorent, plus de clarté et plus de bien-être, c’est, que les âmes sympathiques ne l’oublient pas, la première des obligations fraternelles, c’est, que les coeurs égoïstes le sachent, la première des nécessités politiques. »
  • Les Misérables, Victor Hugo.
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