Avec un certain sens de la provocation, Rodrigo Garcia se saisit de la question des technologies numériques en traçant un parallèle entre l’ubiquité du virtuel et l’omniprésence supposée de Jésus-Christ, peut-être manifestée par cet écran géant qui organise la dramaturgie. Pour éprouver la capacité à faire monde commun, il s’entoure de trois jeunes acteurs et d’un musicien, jouant d’une guitare électrique dont on peine à reconnaître le son, qui célèbrent ensemble l’avènement d’un nouveau monde. Comme à son habitude, Rodrigo Garcia déroule un récit aussi délié qu’extravagant, qui prend tour à tour la forme d’une démonstration de moto sur scène, de la projection du journal intime d’un robot-chien ou d’une litanie de conseils en développement personnel, sans doute issus de forums de discussion. Dans une esthétique smartphone étendue à la dimension d’une scène, la galerie de personnages se prend en photo, se déguise ou filtre sa voix pour prendre part au grand carnaval des réseaux sociaux, comme pour souligner les effets de déréalisation des vies qu’on mène par procuration, ici sur applis.