Comme un cauchemar qui se prolonge, une femme est arrachée de son lit vers trois heures du matin.

Elle doit subir un interrogatoire pour un délit qu'elle ignore et devant un homme qui n’est pas un policier.

Et pourtant, tout semble être dans les limites de la loi.

Elle a été autrefois Fanny Navarro, star du cinéma argentin. Maintenant c’est une actrice méprisée pour avoir été solidaire du régime péroniste qui vient de tomber.

Bientôt il ne restera presque rien : ni de son idéologie, ni de sa personne.

Elle sortira de cet interrogatoire folle et déshonorée, détruite face au rejet du public et de ses collègues.

Dans les mêmes rues, qui un jour l’ont vue vénérée par ses admirateurs à la sortie de ses films ou de ses pièces, aujourd’hui les gens lui crachent à la figure.

Mais quel est son crime ?

Son amitié avec Eva Perón ?

Avoir été une sorte d’informatrice des acteurs qui s'opposaient au régime péroniste ?

Avoir été la maîtresse de Juan Duarte, frère d’Eva ?

L’avoir assassiné, avoir été sa meurtrière ?

L’interrogatoire qui devrait élucider une de ces charges ambiguës est mené par un homme capable de réaliser une descente de police ou une autopsie, quelqu’un qui se prétend militaire et médecin, et dont le nom est une insulte à la civilisation : il se fait appeler Capitaine Gandhi.

Déshonorée est un dialogue entre une femme maudite et un fou.

Ce drame argentin se déroule dans un seul acte vertigineux.

Un drame où se confrontent les extrêmes d’une histoire sans espoir de réconciliation et où la justice se confond avec la vengeance.

C’est pour cela que peu importe qui est Fanny Navarro ou qui était le Capitaine Gandhi, on peut même oublier Perón et Evita, et la Revolución libertadora qui a fini avec le régime.

Dans Déshonorée se trouvent face à face deux archétypes de la mythologie politique argentine. Un être qui s’est laissé enflammer par une idéologie redoutable et celui qui veut à tout prix corriger et punir cette erreur de l’histoire.

Déshonorée est un drame autour d’une actrice victime des dérives d’une justice absurde.

C’est une pièce qui repose sur l’histrionisme des deux interprètes qui devront plonger dans le déchirement d’une identité argentine souvent violente, injuste et arbitraire.

Gonzalo Demaría