Ce texte n’a pas de ponctuation, son écriture est très tranchée et poétique, nourrie d’images, de sensations. L’écriture se construit autour d’une introspection personnelle, d’un « je » égotique et narcissique, en rupture avec un « je » pluriel dissident, dressant un état du monde désillusionné. Il s’agit d’une exploration intérieure violente, malaxée par un débit très dense de mots et constamment lié à la déconstruction inhérente au monde qui l’entoure. Trois comédiens se font les porte-paroles percutants d’une humanité insipide, indolente, mêlant désespoir individuel et exubérance collective.

Le parti pris dans le travail de jeux avec les comédiens est basé sur la recherche d’un sentiment à l’état brut, l’exploration de l’excès. Comment livrer au public une colère, une violence, sans nuance, sans fi oriture ? L’enjeu de ce texte se trouve pour les comédiens dans l’exploration et l’appropriation des diff érents « je ». Il y a une montée dramatique avec pour point de départ le « je » comme constat sans rédemption sur l’humanité, suivie par le « je » anecdotique voire domestique, celui qui campe le comédien dans une interprétation de la réalité confortable mais complaisante. L’aboutissement doit être un « je » devenant « nous », le collectif, nous impliquant sans échappatoire, mais aussi le « je » incarnant l’engagement et la prise de position vitales de l’artiste.