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Quartett

mise en scène Matthias Langhoff

: Présentation

« On cherche la faille dans le déroulement, l’autre dans le retour de son semblable, le bégaiement dans le silence du texte, le trou dans l’éternité, la faute peut être libératrice.»
Heiner Müller




Quartett est, avec Hamlet Machine, la pièce la plus jouée de Heiner Müller : un classique dans le répertoire moderne du théâtre européen. Une pièce de virtuosité pour deux comédiens de renom, une pièce dont la recette est liée à la célébrité des acteurs. Dix ans après la mort de Müller, ses textes meurent dans une réputation consensuelle. Ils alimentent les moulins à prières des universitaires et stimulent l'absence d'humour de quelques congrès sur la littérature. À l’image de la plupart des textes classiques, le théâtre les célèbre régulièrement dans la plus parfaite méconnaissance ; toujours à la recherche d’effets de nouveauté déjà périmés, préférant vieillir le texte pour en faire un soporifique.
Le Quartett de Müller vaut la peine d'être redécouvert, il est sauvage, jeune et destructeur, cruellement comique et troublant au plus haut point. Il s'inscrit en tous points dans la suite de Mademoiselle Julie : deux textes qui mettent à plat sans pudeur la structure des relations entre les sexes et qui tendent à détruire les illusions. Les personnages de Müller, comme ceux de Strindberg, sont fragmentaires, ou plutôt, comme le dit Strindberg, composés de divers lambeaux. Leur intimité : leur amour et leur vie sexuelle s'élargit en guerre civile, en champ de bataille. Les deux pièces mettent en jeu un théâtre de regards, de mots, de contacts. Le drame se projette sur la peau des partenaires. Le désir détermine les règles du jeu. Madame de Merteuil et Valmont sont des combattants, comme Mademoiselle Julie et son domestique Jean. Et il s'agit du pouvoir en amour. Une phrase de La Phénoménologie de l'Esprit de Hegel pourrait en être l'indication scénique de ces jeux : « La relation entre les deux consciences de soi est si déterminée, que, par le combat à mort elles se font, individuellement et réciproquement, la preuve de leur valeur. [Par conscience de soi, il faut comprendre un sujet féminin et un autre masculin, qui sont conscients d'être en opposition en tant que femme et en tant qu'homme. M.L.] Elles doivent mener ce combat, afin d’élever la certitude d'exister pour ellesmêmes à cette vérité d'exister pour l'autre et pour elles-mêmes. » Ces textes ont en eux quelque chose d'irrémédiablement méchant, comme toute vérité.
Ils cassent le jouet des autres. Il émane d'eux des pulsions négatives qui sont nécessaires. Elles aident le théâtre à revenir à sa place politique. « On cherche la faille dans le déroulement, l'autre dans le retour de son semblable, le bégaiement dans le silence du texte, le trou dans l'éternité, la faute peut être libératrice. » (Heiner Müller)
Quartett n'est pas un jeu hors de l'espace et du temps. Le temps et l'espace sont définis précisément « Un salon d'avant la Révolution française / Un bunker d'après la troisième guerre mondiale ». Il s'agit donc de lieux privés situés dans un laps de temps défini par le déroulement de grands évènements historiques. Cet espace et ce temps appartiennent au texte et au jeu. Quartett ne fait pas partie du mouvement général d’adieu à l'histoire. Quartett vit de l'histoire. De l'éloignement de l'histoire, en tant que combat contre l'écoulement du temps.
Dans le chef d'oeuvre de Oshima l'Empire des Sens, il y a une courte séquence qui ne développe pas le combat sexuel des deux protagonistes. Dans la rue, l'homme passe, tête baissée et l'air dégoûté devant des enfants qui acclament une troupe de soldats en marche.
Toutes les fenêtres de toutes les maisons sont ornées de drapeaux japonais. Sans cette scène, le film se réduirait à une très belle oeuvre pornographique.
Le projet Quartett était prévu en trois étapes. Y participent : les comédiens Muriel Mayette et François Chattot, le décorateur et éclairagiste technicien de théâtre Yves Bernard, la productrice Véronique Appel et Matthias Langhoff.
La première étape a duré quatre mois, soit du 15 janvier au 15 mai. Dans une salle de répétitions que nous avons louée, nous nous sommes retrouvés périodiquement, pour investiguer et analyser la mise en jeu du texte, à la manière d’un atelier de création. Nous y avons invité des artistes proches, des élèves, des scientifiques à prendre part au travail. Ces invitations n’ont pas été planifiées, elles sont nées au jour le jour des besoins et de la curiosité suscités par la recherche. Parallèlement, s’est élaborée l’idée d’un éventuel décor. Un montage vidéo a été également construit : un Quartett-commentaire qui éclaire le combat des sexes à travers des images, moteur et refuge dans l’histoire ; le désir de changer de sexe ; le viol et la violence ; le masturbateur comme messager de paix… Cette première étape s’est achevée par la présentation en mai devant un public de professionnels invités, de l’esquisse d’un spectacle.
La deuxième étape présente le spectacle (jeu, film, décor, costumes et lumière) lors de cinq représentations à Paris au Festival d’Automne. Le théâtre du Conservatoire, où enseigne Muriel Mayette, est un lieu idéal. Les représentations seront publiques et gratuites. Elles offriront aux programmateurs français ou étrangers l’occasion de découvrir ce travail.
La troisième étape, l’exploitation du spectacle peut ensuite se prolonger sur plusieurs saisons. Le décor sera conçu dans un souci de mobilité, à savoir de légèreté pour le transport et de facilité de montage. L’un des intérêts prépondérants est de rencontrer en France et ailleurs des spectacles et des compagnies qui travaillent dans cette dynamique. Dans une idée d’échange et de partenariat, nous souhaitons que la Compagnie Rumpelpumpel, étant elle-même responsable de son exploitation, soit à l’occasion en mesure d’investir ses bénéfices dans d’autres entreprises théâtrales.


Matthias Langhoff

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