Poèmes visuels

Avec une marionnettiste, une plasticienne, un vidéaste et un créateur sonore, nous avons élaboré une écriture visuelle et nous nous sommes attachés à composer des instantanés dynamiques qui donnent à voir les paysages intérieurs de P. et leurs métamorphoses.Ces instantanés sont composés d’éléments oniriques, métaphoriques et biographiques.

L’espace scénique est une ouverture sur l’espace mental de P., où l’objet devient symbole et langage.
C’est une fenêtre de 2m50 d’ouverture sur 2m de haut où se croisent manipulation d’objets et jeux d’optique.

D’abord vide et silencieux, l’espace s’emplit bientôt de sons, de mouvements, d’éléments venant du monde hospitalier. Mais, comme dans un rêve, ces éléments sont réarticulés, recomposés. Comme dans une rêve, ils s’offrent comme signes à saisir, libres de toute interprétation.

Les acteurs manipulent des marionnettes, objets insolites et autres totems qui nous transmettent les visions fantasmagoriques de P. Ces objets-matériaux sont des supports à projections de lumière et d’images vidéo.

Figures

Quatre comédiens peuplent le monde distordu de P. Il s’agit pour eux d’incarner de façon éphémère, parfois fulgurante, différentes figures, des fragments d’identité. Ces figures appartiennent à sa mythologie intime, à son environnement hospitalier ou sont le fruit de son imaginaire.

Dans cette atmosphère, les acteurs glissent d’une figure à l’autre. Les personnages changent d’identité, comme de peau et de passé.

Projections

Par le prisme de la vidéo, les acteurs peuvent devenir fantômes de leurs personnages, notre homme, son propre fantôme, un double évanescent. La vidéo nous autorise les ellipses d’espaces et de temps qui lsont coutumières à P. lors de sa traversée.

Pas d’écran figé : des images projetées sur des supports mobiles. Les matières de ces écrans éphémères sont transformables, modulables, étirables.

La manipulation des images déplace encore davantage la perception du spectateur. La projection d’une femme aimée se révèle sur un nuage de fumée, de la vapeur d’eau, puis s’évapore sous nos yeux, le corps projeté de P. surgit sur un film polyane, s’étire, s’allonge puis se déchire.

Matière textuelle

Joël Jouanneau et les acteurs ont inventé des bribes de paroles nous reliant tant au vécu de P. qu’à son imaginaire.

Par ailleurs, nous avons travaillé à disloquer les mots lorsque nous abordons les rivages de la fantasmagorie.

La parole nous permet de glisser d’un personnage familier à un personnage insolite, de créer un pont entre mémoire et chimères. Lorsque les paroles douces d’une mère se transforment en un discours médicalisé.

Lorsque P. glisse vers ses visions, on assiste à une perte du sens rationnel de la langue, la parole tombe en lambeaux, elle devient son, souffle et matière.

Univers sonore

Notre homme est relié à un micro HF pouvant capter en les amplifiant, ses respirations, le moindre de ses mots. Le spectateur pouvant ainsi éprouver une sorte d’intimité organique avec lui.

Nous avons tenté de reconstituer l’espace mental sonore de P. où nous imaginons que le réel de l’environnement.

Le créateur sonore travaille à la manipulation et à la transformation des mots et des sons qu’il capte en direct afin de faire entendre au spectateur ce que perçoit P. Ces sensations sonores déformées se croisent et se superposent à des fragments de souvenirs éparpillés (matériaux préenregistrés)hospitalier vient se mélanger aux dérives de la mémoire et de l’inconscient.

Spectateurs

Nous voulons déplacer la perception du spectateur, lui faire perdre ses repères habituels, qu’il devienne un capteur privilégié de climats, d’atmosphères… que ses sensations divaguent comme celles de P. lors de sa traversée.

Ainsi, le spectateur évolue dans une atmosphère où temps, lieux, personnages réels ou irréels se juxtaposent.