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Le Front pop / Poprintama

+ d'infos sur le texte de Yoann Thommerel
mise en scène Guy Delamotte

: Notes d'intentions

Réalisé quelques mois avant les élections de 1936 et la victoire du Front populaire, Le Crime de Monsieur Lange, de Jean Renoir (et de Jacques Prévert qui l’a en grande partie écrit et à qui on doit la radicalité du propos), témoigne d’un idéalisme social qui n’a rien perdu de sa force subversive.
Face à la disparition de leur patron, l’ignoble Batala, les ouvriers de sa société d’édition s’organisent et prennent en main leur entreprise, parvenant même à la rendre prospère. Parmi ces employés, Monsieur Lange, qui écrit à ses heures perdues les aventures de son personnage Arizona Jim. Ces aventures étaient publiées par Batala, qui organisait à l’insu de Lange leur contamination, modifiant quelques passages afin d’intégrer des réclames au texte. Depuis la disparition de Batala et la nouvelle organisation autogestionnaire, ces mêmes aventures font la fortune d’un magazine lancé par la coopérative. Le succès auprès du jeune public dépasse toutes les espérances. Tout va donc pour le mieux, jusqu’à ce que Batala, qui avait été donné pour mort dans un accident de train, ne réapparaisse en soutane quelques mois plus tard.


Après quelques hésitations, Lange le tue.


Lorsqu’il m’a été proposé d’écrire à partir de ce vieux film de Jean Renoir, j’ai tout de suite dit oui. Avant de regretter. Et de prendre le temps de le regarder.


Je ne savais pas ce que voulait dire écrire à partir d’un film. Je savais simplement que j’en étais probablement incapable. Que je ne pouvais pas écrire avec l’idée d’une contrainte quelle qu’elle soit, qu’une matière préexistante m’encombrait et me donnait envie d’écrire tout autre chose.


Je savais aussi que les questionnements portés par ce film croisaient la plupart de mes préoccupations : l’action politique, les mutations sociétales, la surabondance publicitaire, les utopies, les histoires d’amour bancales, le recours à la violence. J’ai fini par comprendre que cette parenté n’avait pas échappé à ceux qui m’avaient mis le film entre les mains.


Après quelques hésitations encore, j’ai tué Batala, Lange et tous les autres.


Pour écrire Le Front pop.


En mode résolument autogestionnaire.


Yoann Thommerel – mars 2015




La solution est dans le collectif


Comment concevoir un spectacle, quand on ne comprend pas la langue de l’autre ; c’est toujours faire confiance à l’acteur, au texte à dire et à faire entendre et au plateau…
Alors comme un chef d’orchestre sourd on bat des mains en direction du plateau un peu comme un oiseau qui ne peut prendre son envol et résonne alors dans notre tête la musique de la langue, ses rythmes, ses silences et hésitations, parfois des répétitions surprenantes et hoquets qui comme un noyé nous font baisser les yeux sur le texte à sa recherche et saisir en un instant avec effroi la portée où est inscrit le texte.
La respiration du texte, sa vitalité plus que son interprétation psychologique sont à l’oeuvre.
Dans le texte de Yoann en finnois je dois saisir à l’oreille le souffle critique de sa génération et l’étendue de notre résignation à tous, notre incapacité à l’action.
Et cette tentation récurrente et désespérée de la radicalité d’ une révolte qui hante nos mémoires amorphes.
Sans se prendre au sérieux avec juste ce qu’ il faut de dérision et une certaine désinvolture mais sans oublier la rage de vivre et de hurler son désarroi souvent amoureux devant l’absurdité du monde et son cortège d’exploitation, et plus encore face à notre infirmité devant l’autre . Il y a bien une faille dans le dispositif d’être au monde : « Je suis du verbe suivre »… Un être humain que je suis
Le texte nous accompagne jusque dans les recoins les plus cachés de nos petits renoncements et de nos lâchetés. Et ne fais grâce à aucun d’entre nous. Mais, il réactive notre curiosité à ce monde, à l’autre notre voisin…Et je saisis alors le mouvement de ta parole dans l’air : « Tu me parles avec des mots et je te regarde avec des sentiments »


Et nous cheminons ensemble vers la Parole.


Guy Delamotte

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