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Corées

+ d'infos sur le texte de Philippe Gilbert
mise en scène Balázs Gera

: Présentation

La fin du dix-neuvième siècle, la disparition de « l’Empire du milieu » puis la colonisation japonaise divisent en deux parties et deux régimes contraires la péninsule de la Corée. Au Sud, le régime est autocrate, pro-américain. Au Nord, le régime communiste suit les directives de Moscou. Entre 1950 et 1953, la guerre froide connaît avec la guerre des deux Corées son premier conflit majeur. Deux millions de morts. Des millions de déracinés évoluent sur les ruines d’un pays resté aux mains des armées. Au Sud, la dictature militaire laisse place à des espoirs de démocratie. Au Nord, les politiques s’appuient sur l’effroi des populations, menacées par les camps, et sur la peur de l’extérieur menacé par la puissance nucléaire. Metteur en scène de culture juive, originaire de Hongrie, Balazs Géra puise dans la tragédie des Corées le matériau d’un théâtre documentaire, impliqué.


Avec Philippe Gilbert, co-auteur de Requiem pour Srebrenica d’Olivier Py, Balazs Géra recueille auprès de journalistes, de membres d’O.N.G et d’historiens la matière première de sa proposition. Théâtre d’archives sonores ou visuelles, rassemblées entre autres par le réalisateur Dominique Thiel, Corées se déploie en quatre actes pour quatre figures du drame. La vieille dame, le soldat, la réfugiée et le président incarnent les témoins, la machine de guerre, les victimes et les pouvoirs comme les résistances au pouvoir. Sur un plateau nu, devant un écran géant, six comédiens et quelques musiciens forment un choeur. Ils font entendre la réalité tragique des événements historiques, des origines du désastre à son étendue actuelle.


Pierre Notte




Le projet de créer un spectacle qui s’inspire de l’histoire de la Corée est né d’une rencontre avec ma propre histoire. Originaire de Hongrie, de culture juive, j’ai reçu en héritage l’histoire d’une famille qui a connu les camps de concentration, qui a cru au marxisme-léninisme puis qui a souffert de la « dictature du prolétariat ». Pour ma part, à une époque où le mur de Berlin semblait encore indestructible, j’ai été confronté à l’expérience de l’émigration et de l’apprentissage de la vie dans un pays inconnu, la France. Sans doute en partie à cause de cette histoire, j’ai toujours éprouvé un intérêt profond pour l’Histoire.


Durant l’été 2000, les images des réunions familiales, organisées à Séoul et à Pyongyang, m’ont révélé une histoire largement méconnue, celle de la séparation des deux Corées.


Petit rappel des faits:
La péninsule coréenne a été convoitée par le Japon dès l’effacement de « l’Empire du milieu », à la fin du XIXe siècle. La colonisation japonaise (1910-1945) a été d’une rare cruauté et s’est accompagnée d’un déni complet de la culture coréenne.
A la libération, en 1945, la péninsule a été séparée en deux, avec un régime autocrate au Sud, pro-américain, et un régime communiste au Nord, sous la tutelle de Moscou.
La Guerre de Corée (1950-1953) a été le premier conflit majeur de la guerre froide. Des soldats de quinze nationalités y ont pris part. On a dénombré près de trois millions de morts et des millions de personnes déplacées. Après trois années d’affrontements, le pays est entièrement détruit. L’armistice signé à hauteur du 38ème parallèle n’est pas suivi de traité de paix. Depuis lors, de part et d’autre de la zone démilitarisée (D.M.Z.), les armées continuent de se défier.
À partir des années soixante, la Corée du Sud voit sa croissance économique évoluer très rapidement. Dans les années quatre-vingt, elle rattrape le niveau de développement de l’occident. Parallèlement, avec de nombreux soubresauts, la démocratie gagne du terrain. L’élection présidentielle de 1992 marque la véritable rupture avec les années d’autocratie militaire.
En Corée du Nord, le régime de Kim Il-sung (1948-1994) s’est enfoncé dans une politique de culte de la personnalité, d’autarcie économique et de répression intérieure féroce. Aujourd’hui, la Corée du Nord est un pays moribond, soutenu à bout de bras par la Chine et par le programme alimentaire des Nations-Unies. Mais son dirigeant, Kim Jong-il (le fils de Kim Il-sung), continue à tenir les rênes du pouvoir en s’appuyant sur la peur : les camps pour sa population, le nucléaire pour le monde extérieur.
L’histoire contemporaine de la péninsule coréenne est jalonnée de tragédies. La plupart des histoires de vies que j’ai découvertes au cours de mes lectures en témoignent. Au terme d’une année de « voyage livresque », j’ai décidé d’écrire, à partir de témoignages et de documents d’archives textuels et audiovisuels, une pièce de théâtre qui tisserait l’Histoire récente de ce pays avec des histoires, des récits de vie de Coréens.


Pour cela, j’ai voulu travailler en compagnie de Philippe Gilbert qui a déjà participé à l’écriture d’une pièce ayant pour thème un événement historique et de Dominique Thiel qui a réalisé plusieurs films documentaires. Avec Dominique Thiel, nous sommes allés à la recherche des documents visuels existants et avons mis à plat ce matériau. Avec Philippe Gilbert, nous avons rencontré divers spécialistes (historiens, membres d’O.N.G., journalistes...), construit des scénarios et donné naissance aux premières pages d’une pièce qui a obtenu « l’Aide à l’écriture » du Ministère de la Culture. Puis, dans le cadre de deux stages pour comédiens professionnels nous avons mis ce texte à l’épreuve du plateau.


Par la suite - ayant bénéficié du programme «Villa Médicis Hors Les Murs» - j’ai entrepris un voyage en Corée du Nord, Chine et Corée du Sud. Mon séjour en Asie m’a permis de rencontrer certaines des personnes dont le témoignage est à l’origine de Corées et de réaliser des captations vidéo qui seront utilisées dans le spectacle.


C’est à la suite de cette étape de travail que nous avons entamé la rédaction définitive de Corées.


Balazs Gera
Novembre 2005




La pièce se compose de cinq tableaux entrecoupés d’intermèdes.Chaque tableau est centré sur une figure de la tragédie coréenne, et déploie le récit particulier qui lui correspond. Les intermèdes consistent en de courtes séquences filmiques.


Tableau 1 :



La vieille dame Séparée de son frère lors de la guerre de 1950/53, elle ne le retrouve qu’en 2000, au moment des premières réunions familiales, organisées à Séoul et à Pyongyang. Au bout de trois jours de retrouvailles, elle doit de nouveau - et sans doute à jamais - se séparer de lui.

Tableau 2 :
Le communisteEn 1962, il participe à une mission d’infiltration en Corée du Sud. Celle-ci tourne mal. Au bout de dix ans de torture, il cède et accepte de se « convertir». En 2000, quand ses compagnons, restés fidèles au Nord, sont libérés et autorisés à rentrer chez eux, lui, il demeure seul, obligé à se battre pour faire annuler sa conversion.


Tableau 3 :
Le président, Kim Dae-jungPendant les années de dictature militaire en Corée du Sud, il lutte pour l’instauration d’un régime démocratique. Devenu Président de la République en 1997, il devient l’artisan d’une politique de réconciliation avec la Corée du Nord et se rend à Pyongyang en juin 2000. Au moment où il se retire du pouvoir, la révélation de transactions financières occultes pour « acheter » le sommet historique de juin 2000 l’oblige à s’excuser devant la nation.


Tableau 4 :
Le soldat sud-coréen Il fait partie, dans les années 1970, d’une unité de commando entraîné physiquement et idéologiquement à combattre l’ennemi communiste du Nord. Au bout de six années d’enfer, il est renvoyé à la vie civile sans aucun « remerciement de la nation ».


Tableau 5 :
La réfugiée nord-coréenneFuyant en 1997 la Corée du Nord, elle réussit, après de multiples épreuves à gagner la Corée du Sud. Mais le traumatisme des souffrances passées et les difficultés d’intégration dans une société radicalement différente ne lui permettent pas de « recommencer ».


Les textes du soldat sud-coréen, du communiste, du Président Kim Dae-jung, de la vieille dame et de la réfugiée nord-coréenne sont issus de documents d’archives (interviews, lettres, déclarations...) et ils subissent une transposition. En effet, le travail de réécriture du texte (coupes, transformations, ajouts...) s’inscrit dans un travail d’écriture plus général qui prend en compte les autres composantes que sont l’image, la musique et la scénographie.

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